Night is over - Lyuben

Lyuben est, en apparence, très facile à comprendre : c’est un bon gars, direct et droit, un type simple à qui on ne va pas demander d’inventer l’eau chaude mais qui est rassurant et aimable. Jamais il ne hausse la voix. Jamais il n’a été pris à lever la main sur qui que ce soit. Son bon fond n’est pas juste un fond : il déborde à la surface, dans ses sourires, dans ses yeux pétillants de bonne humeur, dans ses gestes doux.
Paisible et sûr de lui, il ne s’effraie pas de grand-chose et répond placidement aux mouvements brusques. L’habitude des écuries et de leur animation l’a rendu parfaitement impossible à faire sursauter. Il paraît qu’une fois, il s’est fait charger par l’un des chevaux et qu’il n’a même pas bougé du chemin.

Il parait aussi qu’il n’a jamais exprimé d’émotion négative.
Ca c’est très faux : il a pleuré le jour où sa compagne a dû repartir avec son employeur. Parfois il fronce les sourcils, lorsqu’il est poussé au bout de sa pourtant grande patience. Parfois il est désespéré par sa position au Manoir, ou par l’état du monde. Il lui arrive même de ressentir de la pitié pour autrui.
C’est pour ça qu’il essaie d’aider ceux qui viennent à lui, attirés par sa réputation de grand gentil. Un bon mot, un bout de son repas, il propose toujours quelque chose à ceux qui en ont besoin. Il voudrait faire plus mais son instinct de préservation l’en empêche.


Il doit donc se contenter de gestes furtifs, quasiment invisibles, pour aider ceux et celles qui veulent s’enfuir.
Oh oui, Lyuben semble facile à comprendre et loyal mais il ne l’est pas tant. Ses années au Manoir l’ont blasé, l’ont usé jusqu’à approcher le point de rupture. Parfois il ne ferme pas à clé une porte, ou il laisse une corde sur le banc devant les écuries. Parfois il y a des pommes et des carottes qui trainent bien en vue. Il ne s’est jamais impliqué plus que ça, par prudence, mais si les rumeurs sont vraies lui ne pourra jamais quitter le Manoir alors autant donner une chance à autrui d’être libre.

Taille : 1m81
Corpulence : Massif-utilitaire, des muscles pour soulever les bottes de foin et du gras pour protéger le tout
Cheveux : Poivre-et-sel avec encore plus de poivre que de sel
Yeux : Noisette
Signes distinctifs : Une collection de cicatrices principalement aux mains et au visage -dûes à divers accidents de chutes et de morsures-, une barbe entretenue avec soin, une toison de torse tout aussi chouchoutée
Style vestimentaire : Son uniforme de domestique, échangé le soir contre un bête pantalon brun et une chemise beige. Il ne fait pas très attention à ce qu’il porte puisque de toute façon, tout sera couvert de terre et de poussière

Il n’y a pas grand-chose à dire de la vie de Lyuben. Né au manoir, fils d’un domestique des Adamovitch -lui-même fils de domestique, lui-même probablement à moitié Adamovitch- et d’une autre Bêta plus récemment arrivé, il est le premier des trois enfants Kanevsky -et le seul lamantin du trio.
Son enfance a été… Hé bien, une enfance, nettement partagée entre le temps passé à s’occuper de ses jeunes adelphes et celui occupé à traîner dans les jambes des palefreniers à les regarder. Ses parents étant trop occupés par leurs tâches pour le surveiller ou se permettre de prendre le temps d’être parents au foyer, il s’est vite retrouvé promu au rang de “parent de substitution” pour ses cadets et de petite main des palefreniers adultes.
Il n’y a donc eu aucune surprise lorsqu’il a été décidé qu’il allait apprendre ce travail, et il n’y a eu aucune surprise lorsqu’il a eu son uniforme de domestique avant ses premiers poils au menton. Et lorsque ces derniers sont arrivés, personne n’a été choqué de découvrir son genre de Bêta.
Tout a toujours été extrêmement prévisible pour lui.
Tout, sauf sa rencontre avec sa compagne alors qu’il n’avait que vingt ans.

C’était la domestique d’un noble de passage dans le Manoir et, plus important, la plus belle femme qu’il aie jamais vu de sa vie. Son coeur s’est mis à battre plus vite, des papillons ont élu domicile dans son estomac… Bref : ce fut un coup de foudre pour lui et heureusement, pour elle aussi.
Dans l’indifférence totale de l'employeur de sa belle qui n’en avait rien à faire des batifolages de son personnel tant que ses draps étaient propres, ils ont réussi à trouver des moments de calme durant lesquels jouer à touche-moi-là. Rouler dans les bottes de foin est devenu leur sport préféré pour quelques années. Certains qu’ils étaient qu’ils se seraient jamais séparés, que le noble de passage rejoindrait la famille Adamovitch, aucun d’entre eux n’a essayé de trouver un moyen de s’assurer qu’ils pourraient rester ensemble -et puis ils étaient jeunes, ils ne voulaient pas encore se marier.

Puis elle a dû repartir. A la suite de son employeur devant retourner dans sa propre famille pour se marier, sa chère et tendre a dû quitter le Manoir, laissant Lyuben le coeur brisé. Il ne s’est pas vraiment battu pour la garder et elle le lui a reproché, lui hurlant au visage qu’il abandonnait trop facilement, qu’il était lâche. Elle n’avait pas tort mais que pouvait-il faire ? Quitter le Manoir et en mourir pour elle ?
Pendant plusieurs mois, le moindre tas de foin, le moindre poteau derrière lequel ils s’étaient cachés, chaque léger courant d’air et chute de neige lui faisaient penser à elle. Il se traînait partout comme une bête blessée, baladant sa douleur comme un poids à son cou.
Puis il a doucement commencé à s’en remettre, à arrêter d’avoir l’air d’un chiot fraîchement grondé. Son coeur était encore en mille morceaux mais il fallait continuer à vivre.

C’est ce qu’il a fait pendant très, très longtemps. Des dizaines d’années banales et plus ou moins inintéressantes, protégé par son statut de domestique et sa distance habituelle avec les problèmes apportés par les relations chaotiques entre Alphas et Omégas. Il a appris à éviter soigneusement les idiots et idiotes en chaleur, à se faire oublier au moindre signe de comportement absurde. Il est devenu ridiculement bon à être juste assez utile pour qu’on ne le regarde pas trop, et trop peu intéressant pour attirer l’attention.
Maintenant ses cheveux blanchissent et il apprend le métier à de nouveaux petits jeunes. Les neiges de l’hiver ne l’impressionnent plus tant que ça et il n’a plus l’âge de vouloir quitter le Manoir. Ses regrets sont aussi âgés que lui, de vieilles blessures qu’il ignore la majorité du temps.
La vie est tranquille. Avec un peu de chance, elle le sera jusqu’à la fin de ses jours.